C’est dans le contexte d’une Biennale Internationale Design Saint-Étienne mettant en avant la création du continent africain que s’est ouvert fin-juin 2022 l’exposition Globalisto. Une philosophie en mouvement au Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole (MAMC+).
En septembre 2021, la saison Africa 2020 tirait sa révérence, avec 1500 projets réalisés dans 210 villes. La commissaire générale sénégalaise, N’Goné Fall, confiait elle-même que cette aventure n’était que le premier « chapitre de la longue histoire d’un mouvement panafricain global, dont nous sommes les héritiers ». En 2022, les musées français « émettent » encore trop faiblement les courants de pensées afrodescendantes. « […] Le MAMC+ choisit de faire sa part, » confie Aurélie Voltz, directrice du MAMC+
Réunis par une Carte blanche donnée au commissaire invité, le DJ et plasticien sud africain Mo Laudi, dix-neuf artistes africain.e.s et afrodescendant.e.s se trouvent exposé.e.s pour la première fois en pays stéphanois, où seule Josèfa Ntjam représente ici la création communale.
Portrait de Mo Laudi – Crédit : Jean Picon.
Dans une volonté connexe à celle du commissariat des expositions Global(e) résistance (Centre George Pompidou, 2020) et Ubuntu (Palais de Tokyo, 2021) de développer un langage artistico-philosophique émanant des Suds, Mo Laudi singularise son projet personnel en choisissant de travailler à partir de ses géographie intimes : l’Afrique et ses diasporas, les politiques de lutte pour des changements sociétaux, les stratégies d’invisibilisation des cultures africaines dans le monde entier, la culture Pop et ses artefacts, les pratiques musicales et le DJing…
L’exposition s’ouvre sur une sélection d’ouvrages et de nombreux documents d’archives qui illustrent en partie la carrière artistique de son illustre mentor, Gerard Sekoto, dont le tableau Song of the Pick (1947), scène social realist (anti-)coloniale, est présentée en fin de parcours.
Sam Gilliam, Josèfa Ntjam, Otobong Nkanga – Vue de l’exposition Globalisto. Une philosophie en mouvement au Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole, du 25 juin au 16 octobre 2022. Crédit photo : C. Cauvet / MAMC+ (1)
“Now on to the 70’s splashy purple and psychedelic green room” glisse avec le sourire Mo Laudi en poussant les portes de la seconde salle, où entrent en conversation de manière inédite les oeuvres de Sammy Baloji, Otobong Nkanga, Josèfa Ntjam et Sam Gilliam. Une attention particulière sera portée à l’œuvre de ce dernier, décédé le jour de l’ouverture de Globalisto le 25 juin 2022. Grande figure de la peinture abstraite, il fut le premier artiste africain-américain à représenter son pays à la Biennale de Venise en 1972. Sa disparition soudaine et sa présence dans la collection du MAMC+ est un écho tout particulier au Lion d’or décerné deux mois plus tôt à sa consoeur Simone Leigh.
Sammy Baloji – Vue de l’exposition Globalisto. Une philosophie en mouvement au Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole, du 25 juin au 16 octobre 2022. Crédit photo : C. Cauvet / MAMC+ (2)
Ici, Mo Laudi par la fine création d’un espace cosmique afro-futuriste – où l’on devient le témoin d’une ambigüe similarité entre (post-)colonisation martienne et africaine – synthétise un vocable iconographique d’extraction de vies, d’informations et de ressources minières, biologiques et océaniques d’une planète X, ou dite “Afrique”.
Otobong Nkanga – Vue de l’exposition Globalisto. Une philosophie en mouvement au Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole, du 25 juin au 16 octobre 2022. Crédit photo : C. Cauvet / MAMC+ Kolanut tales – Dismembered [Histoires de noix de Cola – Démembrées], 2016, textile tissé / filé, polyester, coton organique, lin, acrylique. Courtesy Otobong Nkanga & Galerie In Situ-fabienne Leclerc, Grand Paris.Globalisto. Une philosophie en mouvement. met particulièrement en valeur les formes textiles et vidéos – avec les “portraits-monuments” de l’artiste Raphaël Barontini, l’esthétique “beurcore” de Sara Sadik, les cartographies telluriques de Moshekwa Langa… – et de fait, représente bien le goût de la scène contemporaine actuelle. Le parcours pointu compte également l’exceptionnelle présence sur le sol français d’une œuvre de l’activiste africain-américain Dread Scott, distingué notamment pour son organisation de la performance et reconstitution historique 1811Slave Rebellion Reenactment à la Nouvelle-Orléans en 2019. Un sirocco dans la programmation du musée qui compte bien faire de Globalisto un tournant pour ces collections :
“Nous souhaitons faire du MAMC+ un espace plus inclusif : notre collection compte 20.000 œuvres et 93% de celles-ci ont été réalisées par des hommes euro-occidentaux. Aujourd’hui, nous voulons infléchir ce chiffre. Ainsi, s’ajoutant à Cape II de Sam Gilliam qui est dans nos collections depuis sa réalisation au début des années 1970, nous avons prévu d’enrichir notre fond avec quelques-unes des œuvres présentées pour Globalisto.” – Aurélie Voltz, directrice du MAMC+
Direction donc “Sainté” pour découvrir Globalisto. Une philosophie en mouvement. Pourquoi ne pas faire le déplacement à l’occasion de son Symposium de clôture qui se veut être un événement intellectuel bouillonnant avec la présence notable au sein des tables rondes de l’activiste Dread Scott et du philosophe Norman Ajari.
Globalisto. Une philosophie en mouvement. Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole (MAMC+). Du 25 juin au 16 octobre 2022. Site du MAMC+
(2) Hans Himmelheber, Portrait of his shadow, DR Congo, Kingulu, June 18, 1938, scan of a Chalcopyrite from Kipushi mine, and your reflection in the mirror, [Hans Himmelheber, portrait de son ombre, RDC, Kingulu, 18 juin 1938, reprographie d’une chalcopyrite de la mine de Kipushi et votre reflet dans le miroir], Hans Himmelheber, Performance of a mbuya mask with leaves and raffia costume, DR Congo, Pende region, 1939, scan of a Dioptase from Tantara mine, and your reflection in the mirror, [Hans Himmelheber, danse d’un masque mbuya avec feuilles et costume en raphia, RDC, pays pende, 1939, reprographie d’une dioptase de la mine de Tantara et votre reflet dans le miroir], Hans Himmelheber, Man with mask, DR Congo, Basaka-Mpasu, 10.4.1939, scan of a Dioptase from Tantara mine, and your reflection in the mirror [Hans Himmelheber, Homme avec masque, RDC, pays basala-mpasu, 10 04 1939, reprographie d’une dioptase de la mine de Tantara et votre reflet dans le miroir], Hans Himmelheber, Figure on the roof of Himmelheber’s car, DR Congo, Luluwa region, 1939, scan of a Dioptase from Tantara mine. And your reflection in the mirror [Hans Himmelheber, figure sur le toit du véhicule de Himmelheber, RDC, pays Lulua, 1939, reprographie d’une dioptase de la mine de Tantara et votre reflet dans le miroir], Hans Himmelheber, Masked figure with beak and crown of feathers, munyinga, DR Congo, Byombo region, May 20-22 1939, scan of a Chalcopyrite from Kipushi mine, and your reflection in the mirror [Hans Himmelheber, figure avec masque arborant bec et couronne de plumes, Munyinga, RDC, pays biombo, 20-22 mai 1939, reprographie d’une chalcopyrite de la mine de Kipushi et votre reflet dans le miroir], Hans Himmelheber, Himmelheber’s boots and tipoye bearer, DR Congo, Lele region, January 1939, scan of a Dioptase from Tantara mine, and your reflection in the mirror [Hans Himmelheber, les brodequins de Himmelheber, porteur de chaise (tipoye), RDC, pays lele, janvier 1939, reprographie d’une dioptase de la mine de Tantara et votre reflet dans le miroir] 2020, impression UV sur miroir 4 mm. Courtesy Galerie Imane Farès, Paris.
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