Troy Makaza fait partie de cette nouvelle génération d’artistes, avide de renouveler les codes et d’exprimer son rapport au monde actuel. Après avoir fait ses classes en peinture et en sculpture à la National Gallery School of Visual Art and Design (NGSVAD) d’Harare dont il sort diplômé en 2014, Makaza s’installe dans sa ville natale où il partage un atelier studio avec d’autres artistes.
Fort de son apprentissage, l’artiste met au point une technique à base de silicone industriel et de peinture, alliant travail de la matière et jeux chromatiques. Rondes bosses autour desquelles le spectateur peut circuler – comme pour l’œuvre Cloaking the Obvious, Part 3 – ou toiles accrochées au mur, la dimension sculpturale de son travail se retrouve dans sa prédilection pour des œuvres de grand format, imposantes et superbes.
Les créations de Makaza rejettent les catégories académiques pour donner vie à des œuvres hybrides, à la frontière de la broderie, du modelage et de la peinture. Le plasticien, tel une araignée, déroule ses fils multicolores à l’aspect brillant. Si l’entremêlement des fils et leur abondance grotesque évoque la complexité de la situation politique et sociale du Zimbabwe, le titre des œuvres souligne avec ironie la mascarade d’un gouvernement (Blind Majesty) qui laisse – sans remise en cause (The Opaque Looking Glass) – la pauvreté coexister avec l’extrême richesse.
Une invitation au rêve et à l’optimisme pour un “pays imaginaire” en constante mutation
L’œuvre The Opaque Looking Glass, Part 2 représente un large miroir, dont la couleur vert sombre traduit l’impossibilité d’un quelconque reflet. Ce motif ovale, repris une seconde fois dans la composition, est entouré de diverses formes abstraites et nuageuses qui semblent s’échapper de ce miroir factice. L’aspect fondu voire dégoulinant de la matière intensifie l’impression de déliquescence qui émane de l’œuvre. Quant aux couleurs choisies, elles rappellent en grande partie le drapeau du Zimbabwe, avec une omniprésence du vert, du jaune, du rouge, du noir et du blanc. Au-delà du regard critique, la série Forever Neverland est aussi une invitation au rêve et à l’optimisme pour un “pays imaginaire” en constante mutation.
Figure prometteuse de la scène contemporaine, Troy Makaza a déjà exposé à plusieurs reprises au Zimbabwe, en Afrique du Sud, mais aussi en Australie, en Italie, en France ou encore aux États-Unis. Son travail a d’ailleurs récemment rejoint les salles du musée d’art contemporain Zeitz MOCAA, à Cape Town, où il est présenté jusqu’au 31 mars 2019, à l’occasion de l’exposition Five Bhobh – Painting At the End, une exposition consacrée à la peinture contemporaine zimbabwéenne.
Un article de Mathilde Allard
Featured image : Troy Makaza, The Opaque looking glass Part 1, 2018. Silicone infused with paint. 249cm x 280cm. Courtesy First Floor Gallery, Harare.
→ firstfloorgalleryharare.com > Troy Makaza
Cet article a été rédigé pour The Art Momentum | Cape Town Art Fair Artpaper. [English version inside]
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